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Affaire Barbarin : LA Presse Catholique S'insurge Contre Le Lynchage Mediatique

kath.ch
March 17, 2016

https://www.cath.ch/newsf/affaire-barbarin-presse-catholique-sinsurge-contre-lynchage-mediatique/

Le cardinal Philippe Barbarin, archeveque de Lyon, primat des Gaules, (photo Maurice Page)

“L’affaire Barbarin”, du nom de l’archeveque de Lyon accuse d’avoir couvert des cas de pedophilie, continue de secouer la sphere mediatique francaise. Alors que la presse profane tire a boulets rouges sur le primat des Gaules, les medias catholiques tentent de faire la part des choses. Tout en fustigeant les erreurs de l’Eglise en matiere de traitement des pretres abuseurs, les commentateurs catholiques s’indignent du lynchage mediatique de Mgr Barbarin et du non respect de la presomption d’innocence.

“S’agissant de tels faits, les catholiques – pas seulement la hierarchie ecclesiale – ont trop longtemps cherche la protection du silence”, reconnait Guillaume Goubert, directeur de La Croix. Un constat semblable est pose d’emblee par Jean-Pierre Denis, directeur de la redaction du magazine chretien La Vie. “A l’echelle de l’ensemble de l’Eglise catholique, la lutte contre les abus d’autorite a ete defectueuse”, note-t-il. Meme son de cloche chez le blogueur catholique a succes Erwan Le Mordehec, qui souligne sur son site Koztoujours, qu’il “comprend on ne peut mieux la colere des victimes”, face a la passivite de l’Eglise, qui a laisse en fonction un pretre manifestement pedophile. Ainsi, pour Guillaume Goubert, “un tel silence se paie tres cher (…) Surtout pour les victimes condamnees a interioriser une douleur qui les ronge”. Il rappelle que “l’Eglise est au service d’une Parole qui libere. Le devoir lui impose de faire davantage de place en son sein a la parole de ceux qui ont ete blesses”.

“Spotlight” a la francaise?

Mais meme si les erreurs et la culpabilite des autorites ecclesiastiques sont en general admises, les commentateurs catholiques deplorent le traitement mediatique de cette affaire, vu comme simpliste, generalisant et reducteur.

Erwan Le Mordehec souligne ainsi que “la consultation des quelques articles et des reseaux sociaux me donne vraiment le sentiment que l’opinion, peu attentive aux faits et complaisamment assistee en cela par quelques militants revanchards, plaque sur le cas present un schema qui ne lui correspond pas”. Il releve que la simultaneite de la sortie du film “Spotlight”, qui relate la revelation des abus sexuels dans l’archidiocese de Boston, a notamment pu creer un climat de confusion dans les esprits.

“La chasse au Barbarin est violente”

Jean-Pierre Denis releve sans ambages que “la chasse au Barbarin est violente”. Pour le redacteur en chef de La Vie, “le racolage mediatique se repait d’outrances et d’approximations”. Sur le blog causeur.fr, relaye par le journal catholique Famille chretienne, l’avocat Regis de Castelnau affirme egalement que “nous assistons depuis quelques jours a un lynchage mediatico-judiciaire en grand, comme la presse et les reseaux en raffolent”.

“Faut-il rappeler ce qu’est la presomption d’innocence?”, interpelle ainsi Jean-Pierre Denis. “A supposer qu’elle suive son cours, une plainte ne fait ni un coupable ni un complice”, souligne le journaliste. Cet acharnement mediatique gratuit dont l’Eglise fait les frais indignent particulierement les commentateurs catholiques. “Quand il s’agit de l’Eglise catholique, cible trop commode, toute tentative d’apporter reponse ou nuance sera denigree, ridiculisee, presentee comme maladresse ou mepris. On melangera le passe et le present”, deplore ainsi Jean-Pierre Denis.

Une attaque contre l’Eglise?

Regis de Castelnau affirme carrement que le cardinal Barbarin est “pris en otage dans un combat contre l’Eglise sur les questions societales”. Cette idee d’une attaque sous-jacente contre l’Eglise en tant que telle est egalement mentionnee par Jean-Pierre Denis: “Sans meme parler de reglement de comptes avec le christianisme, a tout le moins avec une Eglise dont on peut comprendre qu’elle paie sa posture moralisatrice, il est possible que certains veuillent faire taire une voix qui porte sur bien des sujets de societe, des Roms a l’euthanasie”.

Erwan le Mordehec estime, dans cette ligne, que “la responsabilite de Mgr Barbarin doit etre evaluee au regard des seuls faits qui lui sont propres, et non d’un quelconque contexte”.

Jean-Pierre Denis souligne ainsi que “la presse et les reseaux sociaux ne sont pas un tribunal d’exception”. Il rappelle en guise de conclusion que “la criminalisation de l’Eglise est insupportable pour tous ces pretres en lesquels les catholiques gardent confiance”.

Que s’est-il reellement passe?

Dans son blog Koztoujours, l’avocat Erwan Le Mordehec fait un retour sur les faits reproches a Mgr Barbarin et analyse soigneusement ce qui lui est reproche:

Le dernier fait de pedophilie connu, commis par le Pere Preynat, est intervenu en 1991. Mgr Barbarin est nomme archeveque de Lyon onze ans plus tard, en 2002. Informe par la rumeur publique en 2007/2008, il s’entretient avec le Pere Preynat, soit 16 a 17 ans apres les faits. Au cours de cet entretien, le Pere Preynat reconnait une nouvelle fois son passe et assure qu’aucun autre acte n’a plus ete commis depuis.

Mgr Barbarin est contacte en juillet 2014, soit 23 ans apres les faits, par une victime ayant constate que le pretre etait toujours en fonction alors qu’elle pensait qu’il avait ete mis a l’ecart. La decision est prise en 2015 de retirer le Pere Preynat de sa paroisse. Elle est effective a l’ete 2015.

Au regard de ces faits, Mgr Barbarin n’a pas “couvert des cas de pedophilie”, ni deplace un pretre d’une paroisse a une autre, remarque Erwan Le Mordehec.

Lorsque Mgr Barbarin arrive a Lyon, cela fait 11 ans que le Pere Preynat a ete deplace. Lorsqu’il est informe de sa reputation, cela fait 16 ans qu’il est de nouveau en paroisse. Aucun acte nouveau n’a ete signale.

Des faits largement connus dans la population

L’avocat francais doute ainsi que la plainte lancee contre l’archeveque pour non-denonciation soit promise a un quelconque avenir judiciaire, “pour des raisons proches de celles evoquees ici et, accessoirement, parce qu’au final on reprocherait au cardinal de ne pas avoir denonce des actes qui ne pouvaient deja plus etre poursuivis quand il les a appris, puisque vraisemblablement prescrits, au moins pour la plupart d’entre eux. Sans compter l’argument avance par certains, selon lequel ces faits etaient tres largement et mieux connus par la population lyonnaise (que par le cardinal, ndlr.) depuis 1991, sans que quiconque n’ait songe a les denoncer”.

La question qui demeure est celle du maintien en paroisse du Pere Preynat a partir de 2007, note Erwan Le Mordehec. “Mais ce n’est pas pour cela qu’il est poursuivi”, souligne-t-il. L’avocat revele ainsi un certain nombre d’elements plaidant en faveur du cardinal, issus d’informations qui lui ont ete communiquees. Lorsque Mgr Barbarin laisse le Pere Preynat en paroisse, alors qu’il n’existe aucune plainte contre lui, en 2007/2008, le primat des Gaules consulte neanmoins un specialiste pour evaluer le risque de recidive, s’assurant qu’aucun fait nouveau n’ait surgi durant les 16 dernieres annees. Il arrange en outre la supervision d’un autre pretre dans la meme paroisse pour eviter que le Pere Preynat soit au contact d’enfants.

Fausse journaliste

Le blogueur rappelle en outre que le cardinal a personnellement donne l’impulsion “d’une politique de verite et de transparence” dans plusieurs communautes religieuses.

Il releve egalement qu’en 2010, une journaliste, se faisant passer pour une victime d’abus sexuels, a rencontre le prelat a la basilique de Fourviere. Ce dernier lui a immediatement conseille de porter plainte, ne serait-ce que pour sa propre reconstruction. A la question de savoir si elle devait “se taire pour ne pas faire de mal a l’Eglise”, Mgr Barbarin a repondu par la negative a la fausse victime, en ajoutant: “tant pis si c’est une honte supplementaire pour l’Eglise!” Le portrait d’un prelat qui negligerait ces affaires, anxieux de la reputation de l’institution, ne tient pas, note Erwan Le Mordehec.

Et l’avocat de conclure: “Mgr Barbarin a pris un risque. On peut repondre que le plus infime risque ne peut etre couru. On peut repondre aussi qu’en pres de 20 ans, un homme peut changer et qu’a ce jour, aucun nouvel acte n’a ete revele malgre la publicite de cette affaire et plusieurs mois d’enquete. Dans le cas contraire, son appreciation en serait evidemment bouleversee. En tout etat de cause, cette affaire est suffisamment serieuse pour que son perimetre ne soit pas abusivement etendu”. (cath.ch-apic/ag/rz)

 

 

 

 

 




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