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« Moi, Philippe, évêque de Lyon, je demande pardon… »

By Céline Hoyeau
La Croix
November 19, 2016

http://www.la-croix.com/Religion/France/Moi-Philippe-eveque-de-Lyon-je-demande-pardon-2016-11-19-1200804313

Dans son mot d’accueil, l’archevêque de Lyon a aussi demandé pardon pour ses erreurs de gouvernance.

Plusieurs centaines de fidèles ont participé le 18 novembre à Lyon à la messe de réparation, sobre et grave, pour les victimes d’abus sexuels commis par des membres du clergé

Victime du P. Bernard Preynat, Vincent Berger, 44 ans, a participé à cette veillée de prière.

["I, Philip, bishop of Lyon, I apologize ..."]

Entouré de plusieurs centaines de fidèles venus pour la clôture de l’Année de la miséricorde, le cardinal Barbarin a célébré vendredi 18 novembre une messe de réparation pour les victimes d’abus sexuels commis par des membres de l’Église. L’archevêque de Lyon s’est agenouillé pour demander pardon pour ses propres fautes et erreurs de gouvernance.

« Moi, Philippe, évêque de Lyon, je demande pardon… » A genoux devant la croix, sous les voûtes de la primatiale Saint-Jean, le cardinal Barbarin a fait acte de repentance publique, vendredi 18 novembre au soir, pour « tant de blessures, tant de silences et tant de phrases indignes », après les scandales de la pédophilie dans l’Église.

Entouré de plusieurs centaines de fidèles venus pour la fermeture de la porte sainte, en cette clôture du Jubilé de la miséricorde, le primat des Gaules célébrait une messe de réparation, sobre et grave, pour les victimes d’abus sexuels commis par des membres du clergé.

> À lire : Le diocèse de Lyon face au passé d’un prêtre pédophilie

« Pardon pour nos fautes, pardon pour mes fautes »

Depuis près d’un an, lui-même a essuyé de vives critiques de la part des victimes du P. Preynat qui lui reprochent de ne pas avoir suspendu plus tôt ce prêtre, bien que le procureur de la République l’a mis hors de cause.

Dans son mot d’accueil lu avec précision, l’archevêque de Lyon a demandé pardon non seulement pour les crimes des prêtres abuseurs et pour les déficiences des membres de l’Église dans leur gestion, mais aussi à titre personnel. « Pardon pour nos fautes, pardon pour mes propres fautes, a-t-il martelé. Ce soir, je demande pardon de n’avoir pas pris les devants pour enquêter comme il aurait fallu dès qu’un premier témoignage m’était parvenu, pardon de ne pas avoir sanctionné immédiatement un prêtre pour ses actes anciens, très graves et clairement indignes de son ministère, pardon de mes erreurs de gouvernance qui ont occasionné un tel scandale ».

> À lire : le texte intégral du mot d’accueil du cardinal Barbarin

Répondre à un appel du pape à prier pour les victimes de pédophilie

L’archevêque a reconnu également que son diocèse s’était « réveillé bien tardivement » et que « la miséricorde ne dispense pas de la justice, elle la suppose. » Il a redit son engagement à faire de l’Église « une maison sûre » pour les enfants. « Depuis quelque temps, quand j’entends le Seigneur dire : « Ce que vous avez fait au plus petit de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait », je ne peux plus m’empêcher de penser aux enfants victimes des prêtres pédophiles », a-t-il encore affirmé.

Ce n’était toutefois pas la première fois qu’il prononçait ces mots forts. Dix jours plus tôt, il avait accompli le même geste aux côtés de ses confrères évêques réunis à Lourdes en Assemblée plénière, répondant, par là, à l’appel du pape François adressé à toutes les conférences épiscopales du monde entier à prier publiquement pour les victimes.

> À lire : A Lourdes, la repentance des évêques de France

Un geste venu « trop tard » pour les victimes

En mars déjà, lors de la messe chrismale célébrée dans son diocèse, il avait eu les mêmes mots, passés presque inaperçus dans le climat de crise de l’époque. Seront-ils mieux entendus cette fois-ci ? Si les victimes avaient été « spécialement invitées » à cette messe de réparation, elles étaient toutefois peu nombreuses dans l’assemblée. Pour certaines, ce geste venait « trop tard », d’autres doutaient de sa sincérité.

Le cardinal en a pris acte dans son mot d’accueil assurant que « toutes, cependant, sont présentes à notre prière » et expliquant se mettre « à genoux devant la croix du Seigneur, comme j’aimerais me mettre à genoux devant chacune des victimes ». « Nous avons plusieurs fois demandé pardon et je le ferai autant de fois qu’il faudra », a-t-il dit.

L’une des victimes, Vincent Berger, 44 ans, avait tenu à être présent, bien qu’il se dise aujourd’hui non croyant, et a lu des intentions de prière. Celles-là mêmes qui avaient été préparées avec des victimes dans le diocèse d’Orléans et utilisées lors des vêpres de Lourdes, dix jours plus tôt, par les évêques. « J’ai particulièrement apprécié la demande de pardon du cardinal Barbarin, c’était très clair, sans cafouillages, les mots étaient justes. J’ai moi-même ressenti beaucoup d’émotion en lisant ces intentions », a-t-il réagi à la sortie, accompagné de son frère.

« Il y a tellement de colère en nous »

Vincent Berger, qui fut agressé par le P. Preynat pendant plusieurs années lorsqu’il était scout et a depuis suivi une formation pour devenir psychanalyste, s’était exprimé devant les prêtres du diocèse de Lyon en avril dernier, réunis à Valpré autour de l’archevêque.

« Il y a tellement de colère en nous, c’est normal qu’elle s’exprime et je comprends que certains la dirigent contre le cardinal Barbarin, mais à mes yeux, il n’est pas plus impliqué que les autres dans l’Église et l’on ne va pas renvoyer tout le monde… Moi-même, j’ai ma part de responsabilité car j’ai revu en d’autres circonstances le P. Preynat et je ne suis pas allé plus loin dans les démarches. Je préfère aujourd’hui collaborer avec lui qui veut mettre de l’énergie à faire évoluer les choses ».




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