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Les Victimes D’abus Sexuels Maintiennent LA Pression Sur Le Pape

By Simon Petite
Le Temps
June 7, 2018

https://www.letemps.ch/monde/victimes-dabus-sexuels-maintiennent-pression-pape

La date de l’offensive de communication est premeditee. Deux semaines avant la visite du pape Francois a Geneve, un reseau international pour lutter contre les violences sexuelles commises par les pretres a annonce jeudi sa constitution. Formee d’associations de victimes d’une quinzaine de pays, cette nouvelle organisation – nommee Ending Clerical Abuse (Mettre fin aux abus du clerge – ECA) – tient son assemblee constitutive ces jours-ci a Geneve.

Devant la presse, ses representants, dont de nombreuses victimes, ont chacun pose avec un portrait d’un religieux, accuse de violences sexuelles ou qui aurait couvert de tels crimes. «Nous lancons un appel au pape Francois pour qu’il tienne ses promesses de tolerance zero a l’egard des actes de pedophilie au sein de l’Eglise», plaide le Francais Francois Devaux, lui-meme victime d’un pretre dans les annees 1970. Il preside une association, Parole liberee, qui met aussi en cause le cardinal de Lyon Philippe Barbarin accuse d’avoir maintenu ce pretre qui a ensuite abuse d’autres enfants.

De timides avancees en Suisse

«Les victimes parlent rarement. Mais les actes que nous denoncons sont rarement isoles et nous sommes chaque fois choques de constater que, malgre les soupcons, les pretres incrimines ont pu continuer a officier au contact d’enfants», temoigne le Valaisan Jean-Marie Furbringer, abuse par un capucin a Saint-Maurice, quand il avait 11 ans. Apres un long chemin, il a fini par s’adresser a la justice civile en 1995 mais les faits etaient prescrits. Par la suite, d’autres victimes du meme pretre se sont fait connaitre. Des abus dans d’autres cantons ont emerge.

En 2015, l’Eglise catholique a consenti a la creation d’une Commission d’ecoute, de conciliation, d’arbitrage et de reparation (Cecar). Cette instance composee de personnalites de la societe civile a deja accorde des indemnites a des victimes. Mais la bataille est loin d’etre terminee, car la commission a suspendu ses travaux depuis mars, en attente de garanties d’independance vis-a-vis de l’Eglise catholique.

Rattrapage papal apres la visite au Chili

«Ce reseau international permettra aux victimes d’avoir plus de poids face au Vatican», espere Jean-Marie Furbringer. Sans les soutiens venant d’autres pays, analyse-t-il, le pape n’aurait pas revu son jugement sur les abus sexuels commis au sein de l’Eglise chilienne, le dernier scandale qui secoue le Vatican. Recu dans le pays d’Amerique latine en janvier dernier, le pape Francois avait apporte son soutien a l’eveque Juan Barros, pourtant soupconne d’avoir couvert un pretre pedophile. Ces propos avaient fait derailler la visite papale.

Francois tente depuis de se rattraper. A la mi-mai, il a convoque l’ensemble des eveques chiliens, lesquels ont tous presente leur demission. Le pape n’en a pour l’instant accepte aucune. Mais, le 31 mai dernier, il adressait une lettre aux catholiques chiliens reconnaissant la «culture d’abus et le systeme qui a permis de couvrir» ces agissements. «C’est un aveu sans precedent au sein de l’Eglise catholique», salue l’Americaine Anne Barrett Doyle, codirectrice de l’ONG BishopAccountability.org. Mais le souverain pontife se heurte a de nombreux obstacles structurels. «Il n’y a aucune regle au sein de l’Eglise catholique qui oblige les eveques a revoquer le mandat des pretres abuseurs», pointe Anne Barrett Doyle.

Lire aussi: «Un nouveau pretre chilien accuse de pedophilie suspendu»

Prise de conscience

«Si nous nous concentrons sur l’Eglise catholique, c’est que sa structure est unique. Le Vatican est un Etat avec un monarque absolu, qui a le pouvoir de changer les choses», justifie Peter Saunders, fondateur de l’association britannique des enfants abuses (Napac).

Representant des victimes chiliennes, Jose Andres Murillo vient d’etre recu longuement par le pape Francois. Il croit a une reelle prise de conscience chez le souverain pontife apres sa visite catastrophique au Chili, meme si, dit-il, il ne pouvait ignorer les accusations contre l’eveque Barros. «Les paroles fortes sont aussi des actes, estime Jose Andres Murillo. C’est un commencement mais il faut que cette prise de conscience s’etende aux autres pays, car nous sommes face a une epidemie mondiale.»

 

 

 

 

 




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